Je termine la lecture dans les journaux des nombreux comptes-rendus de l’année ainsi que de
Il est notoirement reconnu dans le monde des médias qu’une « bonne nouvelle n’est pas une nouvelle ». Je ne dispute ni ne discute cela. Ce qui me perturbe cependant c’est cette idée généralement admise que nous sommes dans une crise à n’en plus finir, que ça ne peut plus durer ainsi, que tout va mal, tout le temps. D’où l’indignation et le cynisme comme mode de vie. D’où la fascination quelque peu suspecte envers le pire, le « trash », le dégoûtant, l’infect.
L’écrivain Paul Auster nous dit que le cynisme est un réflexe de notre temps. « Le cynisme, comme son envers le sentimentalisme, ce n’est pas la vie. Je pense que les gens ne vivent pas intérieurement d’une manière cynique. C’est trop facile d’être cynique. »
Nancy Huston dans son livre Professeur de désespoir en rajoute : « Nous devenons schizos les amis. Dans le quotidien, nous tenons les uns aux autres, suivons l’actualité avec inquiétude, faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour préserver et renforcer les liens. En tant que lecteurs ou spectateurs, au contraire, nous encensons les chantres du néant, prônons une sexualité aussi exhibitionniste que stérile et écoutons en boucle la litanie des turpitudes humaines ».
Que se passe t’il donc? Ne sommes-nous pas en train de donner ses lettres de noblesse au nihilisme? Ce n’est pas parfait, ce n’est pas le paradis donc on détruit tout et on recommence!
Fritz Zorn cité dans le livre de Nancy Huston : « Le quelque chose a toujours des défauts; seul le rien est parfait. »
André Glucksmann dans Dostoïevski à Manhattan : « L’éternel binarisme contestataire : ici rien ne va. Ailleurs s’annonce le meilleur des mondes. »
Lors d’une entrevue à l’émission « Tout le monde en parle » l’écrivain et ancien journaliste Gilles Courtemanche s’est exprimé avec beaucoup d’émotion sur une expérience qu’il a vécue dans un pays en guerre. Une bombe venait de sauter et des photographes s’acharnaient sur les morts et les décombres. Lui voyait plutôt un couple, juste à côté, qui s’enlaçait et s’embrassait comme pour se consoler. Courtemanche se désola : « On ne montre que ça, la guerre, la désolation… » Mais il n’y a pas que « ça ». Il y a aussi les étreintes de l’amour, sinon nous serions tous disparus de la surface de la terre depuis longtemps. Sinon il n’y aurait pas six milliards d’habitants ici-bas!
Nous ne sommes pas plus fins que nos ancêtres. Nous n’avons pas inventé l’horreur, la guerre, les crises. Nous avons seulement inventé l’art de s’en délecter davantage à travers les médias de masse et internet et nous croyons finalement qu’il n’y a que cette réalité de vrai. Comme si nous avions conclu que sur une année entière il n’y a que les six mois de noirceur qui sont réels.
Je souhaite seulement que nous acceptions l’existence à la fois de la noirceur et à la fois de
C’est mon souhait pour l’année qui commence.
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