30 juin 2011

Le tapis rouge aux questions


J’aime les questions. Je devrais dire plutôt qu’elles m’aiment, elles. Elles se déposent dans un mortier que je traine toujours avec moi et dont je me sers pour les moudre, comme des épices, avec le pilon du bon sens. Ma porte est ouverte et elles entrent, parfois en se faufilant discrètement, mais en d’autres occasions je peux vous garantir qu’elles font un boucan de tous les diables…

La dernière en liste était celle-ci : est-ce qu’il y a une fin au questionnement?  Est-il possible d’aboutir un jour à la question ultime qui résumerait en quelque sorte toutes les autres, qui les contiendrait tous et nous mènerait ainsi vers la seule réponse possible englobant elle-même toutes les autres réponses entrevues antérieurement?

Une image a alors surgi. Je tiens un tapis rouge à bout de bras et il commence à se dérouler lentement au rythme des questions qui se brodent en lettres d’or sur sa surface. Une main invisible survole avec un fil au-dessus du tapis, exécutant l’œuvre, enfonçant l’aiguille qui dessine chaque lettre, chaque mot et à la fin ce point d’interrogation sans lequel rien n’avancerait. Bientôt je vois disparaître le tapis devant moi. Il s’éloigne de plus en plus en accumulant son lot d’interrogations les unes après les autres, sans ralentir. Du bout de mes doigts je ressens une vibration, l’œuvre avance, évolue, se fignole. Le tapis déroule. Je continue à le soutenir (à le nourrir?)…

Le temps s’écoule en suivant la mesure du travail accompli et que je ressens toujours dans mes mains. Puis, tout à coup, plus rien. Je demeure figé. Est-ce la fin? J’attends encore un peu. Je me penche enfin avec précaution et dépose délicatement l’ouvrage sur le sol. Entre mes jambes, je distingue alors une bordure rouge juste à l’arrière de mes talons. Je me retourne brusquement, surpris de la chose. Le tapis m’avait rejoint.

Avais-je fait le tour de la question?

Je me penche encore une fois, prends le tapis à deux mains et le soulève. Je lis lentement la dernière phrase écrite en lettres brodées d’or.

« Ne serais-tu pas toi-même la réponse à toutes ces questions? »

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