12 décembre 2013

À propos de libellule et autres chefs-d’œuvre

Je me suis rapproché lentement de la terre, non pas par dépit ou obligation, mais par simple amour.

Je lis la terre pour la comprendre. Un jour j’ai eu la volonté d’intégrer l’inconnu et le nouveau dans ma façon de penser. Quoi de neuf sur la terre? Mais la terre elle-même! Elle tourne, elle se transforme, elle irradie dans son indicible beauté. Et elle porte en elle toute la signification profonde du mot diversité.

Diversité. Comme la vie, comme son incroyable nomenclature d’animaux, de plantes, d’organisme de toutes sortes. Je suis en fascination devant sa diversité. Est-ce à dire sa beauté?

Un été, au bord d’un lac, au pied de ma tente, j’ai vu. Il y avait des dizaines de libellules qui entonnaient de grands discours d’excursions effrénées. De tendres voiles se dressaient en apparition fantomatique à la surface de l’eau. Quelques huards s’exerçaient encore à plonger et hululer. Je me suis mis à croire qu’il n’y avait plus rien à dire, plus rien à penser.

Il suffisait de voir.

Pourquoi des libellules, des grenouilles souriantes? Mais pour notre propre bonheur! Pourquoi toutes ces fleurs enflammées? Mais pour notre plus grand bonheur!


Mettons un instant de côté ce regard poétique sur la vie. Qu’ont-ils aussi à nous dire tous ces chefs-d'œuvre? Mais que nous sommes faits de la même étoffe. La terre nous enseigne l’humilité. Elle enseigne que l’humanité se compose d’autant d’individus uniques, que cette incroyable diversité n’a pas de prix, que nous devons la chérir et la protéger. Diversité, beauté et unicité se regroupent dans l’homme.

Je répéterais mille fois avec des millions de gens cet événement unique en bordure du lac. La nature m’a montré et j’aime croire qu’elle enseignerait à tous la même idée. Elle dépasse sous les jupons d’une vie en pâmoison devant l’éclatement enjoué de sa progéniture. Cette idée, elle est douce, elle est claire : nous avons, qui que nous soyons, une place bien chaude qui nous tend les bras. Notre existence unique nous invite au partage pour notre plus grande édification à tous, pour notre plus grand bonheur.

Admirer la libellule, c’est admirer et respecter l’homme…

11 décembre 2013

P’tit guide doux

Je rêve d’un guide. Je rêve d’un guide écrit à l’aube au coin d’une table. Un guide pour les enfants meublé de mystère joyeux et qui se lit en mangeant des céréales.

Je pense à un guide qui nous conduit nulle part, qui nous cache l’essentiel et se déroule comme un vieux parchemin oublié au fond d’un coffre de cèdre. Je pense à un guide qui nous parle d’étoiles filantes et de péchés véniels que nous racontaient nos vieux en riant. Ces vieux survoleraient son écriture comme des oiseaux de liberté, se prononçant sur la vie qui passe et nous dépasse. Je les sentirais me serrer les épaules de leurs grandes mains puis me dire ne pas m’en faire si je ne comprends rien et si mon guide s’enfonce, inutile, dans des bordures de mers infinies.

Je pense à chanter des mots au rythme de guitares lancinantes puis les écrire sur une portée comme dans une partition de Bach, bourré de croches et de silences. Mon guide, un concentré d’airs inconnus qui se déploie dans un champ de boutons d’or et d’épervières orangées.

Je rêve d’un guide qui se lit en donnant la moulée aux animaux, en décapant de vieilles fenêtres et s’essuyant le front devant les ardeurs du soleil. Je rêve d’un guide bricoleur qui s’échine à la besogne du bien, un guide de la grimpée aux échelles, un guide du labeur silencieux rempli de poussières d’argent et de copeaux enchantés.

Mon guide je le vois disparaître sous les manteaux quand s’approche minuit, le temps du rêve. C’est un guide du repos de l’âme qui brode son destin. C’est un guide d’histoires insensées, de vieux contes sans queue ni tête, de légendes farfelues.

Mon guide, serait-ce un guide?

Il égrène ses notes de violoncelle sur fond d’hiver blanc. Il demandera de l’attention, l’oreille musicale, une vision de chat, un doigté de petites sœurs qui distribuent l’encens.

Je rêve d’un guide qui s’inhalera assis sur une grande couverte étalé sur la plage, qui s’inhalera comme des grains de sable pour les transformer en châteaux éphémères.

Un guide de châteaux éphémères.

Un petit guide doux.