1 juin 2009

Le son de la Terre

Imaginons la déesse Gaïa — la Terra-Mater des Romains — revenue du fond des âges pour entendre la musique que fait sa planète lorsqu’elle tourne sur elle-même. Jadis, lorsqu’elle était encore présente dans le cœur des hommes, elle aimait sentir cette curieuse vibration qui l’enveloppait tel un tourbillon de vent. La terre se roulait alors à ses pieds en murmurant d’étranges mélopées et le son produit agissait toujours comme une caresse dont elle ne se lassait jamais.

Elle s’approche maintenant et tend l’oreille. Elle remarque tout de suite une effervescence, une agitation forcenée à la surface du corps céleste. Elle se concentre à nouveau et recherche désespérément la vibration délicieuse, ce HUM étincelant qui l’obsédait tant. Peine perdue. Le bruit des hommes a tout dévoré comme un trou noir.

Avant de s’en aller, elle se penche une dernière fois et écoute avec effroi ce qui réussit à recouvrir si peu délicatement le chant délicieux venu chercher. Des cris, des bruits de bottes martelant le sol, le grincement acide du métal, les grondements de foules en pâmoison devant leurs sauveurs patentés, des gémissements et des pleurs, clameur sans fin de réprobations, chahut et tumulte, cacophonie des ondes, machinerie titanesque grugeant s’il le fallait jusqu’aux étoiles, agitation désordonnée, voix de stentor désarticulées exhortant à la haine. Le chant de la terre enseveli sous la vapeur toxique des bruits de l’homme.

Gaïa en pleur se retire, des larmes de désespoir glissant en silence sous des yeux éperdus, aspirée vers une maigre lueur de quelques contrées lointaines.

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