4 septembre 2009

Ne pas s'en faire avec la vie


En entrant à l'improviste dans une librairie, je vis sur un présentoir le titre suivant : "Dieu aime celui qui ne s'en fait pas avec la vie". Le livre trônait au milieu de la place centrale, entouré de dizaines d'autres, les derniers arrivages.Mon attention bifurqua ailleurs.

Je continuai à rôder à travers les allées, sans but précis, seulement pour m'imprégner des formats, des couleurs et des sujets proposés.

Plus loin, un enfant assis par terre, une bande dessinée en équilibre sur ses jambes croisées. Il lisait. Il regardait des mots, des images, fasciné, complètement absorbé dans son activité. J'eus la conviction qu'il ne s'en faisait pas avec la vie. Il la consultait, plutôt. Il exerçait sa curiosité, s'abreuvait à une existence faite de textures innombrables, de lieux, de mots, de moments de grâce qu'il pouvait jouir en toute candeur et liberté.

L'ambiance feutrée faite de recueillement que l'on retrouve dans les librairies et les bibliothèques me rapproche de la condition humaine. Elle me rapproche de cet enfant qui plonge goulument son regard dans un océan d'inconnu. Elle me rapproche de l'amour des hommes, de leurs efforts pour comprendre leurs aventures mystérieuses, raconter des histoires, véhiculer leur sagesse et leur vulnérabilité. Cette ambiance me touche, car les livres ne disent pas mieux le courage qu'il faut pour approfondir l'existence, se l'approprier et l'exalter.

Je repense à ce titre "Dieu aime celui qui ne s'en fait pas avec la vie". L'affirmation me plaît, bien qu'elle me laisse perplexe. De quelle vie parle-t-on, au juste ? Quand je perçois tout ce concentré de misère qui englobe le simple nécessaire de millions d'individus, je me demande s'il est possible et même sain de penser ainsi. Mais si c'est Dieu qui le dit...

N'est-il pas sage de ne pas s'en faire avec la vie ?

C'est s'approprier un don, une qualité, en quelque sorte. Qui se distingue par une attitude faite de détachement serein. Pas facile. Ce qui ne veut surtout pas dire que nous ne faisons rien avec notre existence. Au contraire, accepter les aléas de la vie, ses moments de joies et de tristesses, nous situent au centre même de l'existence, au coeur de son tourbillon et nous propulsent dans la direction que notre destin génère. Ce destin unique qui se fignole lentement hors du courroux de la peur ou de ses petites soeurs jumelles : inquiétude et insécurité.

J'ai essayé de retrouver ce titre, mais peine perdue. Existe-t-il vraiment ? Ai-je bien lu ces mots, ou mon esprit, conditionné par mon état d'être à cet instant précis, a fabriqué de manière inconsciente une superposition à d'autres mots qui s'y rattachaient ? N'ai-je pas imaginé toute cette mise en scène ? L'ai-je réelllement vécu, je veux dire dans notre monde concret et matériel ?

Cette question n'a pas d'importance (a-t'elle déjà eu de l'importance?). Car, l'essentiel n'est-il pas de nous interroger sincèrement afin de savoir s'il vaut mieux ne pas nous en faire avec la vie plutôt que nous sentir étouffer constamment par une ceinture de soucis en arguant que cela fait plus responsable, plus professionnel, plus conscient ?

1 commentaire:

  1. j'ai souvent l'impression de voir des choses ou bien de lire des mots qui en les revoyant ou le relisant me font réaliser qu'ils se sont, d'une certaine façon, matérialisée momentanément afin de refléter ce à quoi mon esprit pondérait.

    Mais n'était-ce pas la gang à Platon qui disait que le monde physique est défini (ou limité) par ce que nos sens sont en mesure de capter? Et si c'est ainsi, nos sens ne sont-ils pas réalité que des courants électriques chargés de transporter de l'information au cerveau qui a son tour décodera l'information obtenue? Le cerveau, véritable centrale électrique, n'est-il pas doté d'un pouvoir décisionnel? n'est-il pas capable de juger, de prendre des décisions, d'affirmer, d'infirmer, de déduire, de convaincre, de prétendre? peut-il alors nous induire en erreur? je crois que oui, et ce, seulement pour nous emmener plus près d'où nous voulons être, là où le cerveau baignera dans un sentiment de bonheur, son havre de paix là où l'endorphine coulera à flot.

    Marc Parent
    2009-09-04

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