27 mai 2010

La traversée des mille jours


Te souviens-tu lorsque j’errais à travers la grande plaine, animal sauvage et solitaire? Te souviens-tu, car je t’ai souri et tout mon visage te disait aussi : « Viens à ma rencontre. »

Tu as écouté, comme toujours; puis nous avons marché en nous joignant au chant qui s’élève de la terre lorsque nous caressons sa chevelure. Nous avons marché sans but, juste comme cela, par plaisir, côte à côte, d’un même pas. Et j’ai compris soudain que ce rythme était le mien depuis le tout début, mais que je l’avais perdu.

Nous avons marché, le silence se joignant au vent, le vent soulevant nos pas.

Nous avons marché tout le jour, puis la nuit tomba. Tu m’as regardé; tes yeux dévoilaient étoiles, lunes et planètes et tout l’arbre des profondeurs cachées, plus loin que la nuit, plus loin que le commencement de tout. Tu m’as regardé plein d’amour et tu as dit : « Ne crains pas la nuit, marche, marche! Ne crains pas la nuit, marche! »

Nous avons continué, libres, le pas léger, glissant dans le noir opaque, sans peur, invincibles…

Te souviens-tu aussi, te souviens-tu de cette société d’hommes près d’une ville sans nom : les uns pleuraient, les autres gémissaient plein de mélancolie dans le cœur? Tu as perçu le malaise dans mes yeux et tu as su lire comme toujours mon désarroi. Comme toujours tu as compris. Tu m’as alors dit : « Sur des cendres, plus jamais ne pleure. Va vers le feu! Va vers le feu et dépose ton bois, alimente la flamme, nourris la flamme de ta vie, et chante! »

Voilà tes dernières paroles, car tu es parti avec le sourire. Mais tu m’as exhorté à continuer à chanter, à marcher.

Et depuis lors je chante, je marche, je chante et je marche.

Je marche.

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