15 juillet 2010

Cinéma maison en 3D et son surround


Il y a un coin d’ombre dans ma cour arrière où je m’installe le plus souvent avec l’envie claire de me laisser à l’abandon des choses. Les images s’agrandissent alors et les sons se précisent en un joyeux éclatement de beautés. Je baisse parfois les yeux, contemple la page blanche à combler de mon tourment d’écriture ou regarde les quelques lignes du livre que je traine avec moi.

Mais la tentation est trop forte...

Mon regard se pointe à nouveau là devant dans un brusque changement aux contrastes violents et chargés d’émotions. Les hémérocalles m’entourent de leurs longs cous gracieux et une compagnie de rudbeckies jaunes safranées me scrute avec une surveillance accrue, car ils savent reconnaître la bienveillance d'un humain. Les clématites mauves exultent dans le treillis et plus loin les fougères se dandinent main dans la main sous le tilleul.

Tous ces charmes me disent que la vie est bonne, compagne de cette terre qui nous accueille toujours à bras ouvert.

Je ne me lasse pas. Je reconnais bientôt le gazouillis des mésanges qui pigrassent dans les grands érables, puis le chant de la paruline bleue venu s’établir l’an passé dans ces mêmes arbres. Je sais que ces oiseaux ne chantent que pour satisfaire leur certitude de l’amour.

Je suis entouré par les dieux de la nature. Et qu’est-ce que je pourrais faire d’autre que me taire puisque jamais je ne pourrais rivaliser avec autant d’innocence !

Il est des moments où l’on voudrait que tout s’arrête, que les heures et jusqu’aux secondes même cessent de courir, car le spectacle devant soi est tellement captivant et que l’on désespère de ne rien vouloir manquer. Le véritable spectacle se tient devant nous, à notre portée, et peut-être devrions-nous nous tourmenter de manquer ne serait-ce qu’un seul battement d’ailes du monarque ou qu’une simple note du bruant chanteur.

Je crois que c’est à se vautrer devant cet intermédiaire facile qu’est la télévision que l’homme s’éteint. Il baisse alors les yeux et devient sourd. Il participe à une mécanique qui le tue petit à petit. Une mécanique captivante, soit, mais qui l’oblige à se désintéresser du vivant qui ne cesse de s’éclater gratuitement sur cette toile infinie, là devant.

Oublier ce vivant, c’est s’oublier soi-même.

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