30 décembre 2009
Le travail d'humanisation
24 décembre 2009
La trace du loup blanc

Mes yeux croisent un bataillon de bruants des neiges qui s’exécutent en feux d’artifice dans le ciel. Ils dansent une chorégraphie conçue par un diable joyeux ne vivant que pour ses tours pendables. Plus loin, un harfang s’enfuit avec sa proie inerte dans son bec crochu. Je marche sur un chemin durci de neige en notant chaque crissement de mes bottes au contact du sol. Cette musique finit par m’enjôler. Elle prend ses droits dans le silence qui hurle d’immensité morte.
Curieusement, cette immensité me rassure.
J’ai l’impression de retrouver un monde, un pays familier et cette reconnaissance redouble mon ardeur, me stimule à avancer toujours plus loin. Je marche toute la nuit puis le jour suivant et encore un autre jour pour me retrouver enfin au pied d’un large monticule rocheux devant lequel je fige. J’imagine un géant qui a déplacé juste pour son plaisir et éprouver sa force une centaine de grosses roches pour ensuite les empiler les unes par-dessus les autres de façon désordonnée. Je distingue vers la droite quelques sapins qui se pointent dans le ciel. Cet autre relief m’agresse comme un coup de poing après le désert de la plaine infini. Je redresse ensuite les yeux en direction du sommet de ce monticule une dizaine de mètres plus hauts. Une forme humaine m’observe sans bouger, elle m’étudie dans une attitude hiératique et ses yeux perçants ne semblent jamais ciller. Cette présence me sidère et à mon tour je cherche à le détailler. C’est un Amérindien. Il a la peau du visage cuivrée et ses traits sont burinés par le soleil. Sa tête est nue bien qu’un large bandeau de tissu clair lui cache le front. Deux tresses descendent de chaque côté du visage jusqu’à sa poitrine. Ses larges épaules sont recouvertes d’une peau de bison. De sa main gauche, il tient un arc superbe à double courbe d’une longueur presque inimaginable, car elle le dépasse d’une tête alors que l’autre extrémité touche par terre. Je lève la main pour lui faire un salut et lui signifier ma présence. Il ne bronche pas et continue à m’observer. Je n’ose parler, le temps semble arrêté. Je me sens comme un enfant perdu, mal à l’aise devant une nouvelle réalité qui lui est tout à fait inconnue et qui lui pose une question insoluble. Puis j’entends : « Comment es-tu parvenu jusqu’ici?» Je réponds que j’ai suivi la trace de sang laissée par le loup blanc. « Tu as fait ce qu’il fallait », me rétorque l’Amérindien. Il prend alors une flèche, l’installe sur son arc, me pointe et tire. Je reçois la flèche en plein centre du front.
Le grand arbre

23 décembre 2009
Paradoxe
Dialogue
22 décembre 2009
Jalâl ud Dîn Rûmî

Je ne peux passer sous silence ce poète et mystique soufi qui a vécu au 13e siècle en Perse. Il nous a laissé des textes uniques, la plupart inspirée par son maitre Shams de Tabriz. Il est dit que de son temps il aimait autant fréquenter les chrétiens et les juifs que ses coreligionnaires.
La main qui donne...
21 décembre 2009
Serge Bouchard

Serge Bouchard est anthropologue. C’est aussi un de mes auteurs québécois préférés.
On a pu longtemps l’entendre à la radio, en compagnie de Bernard Arcand. Ils discouraient ensemble sur ce qu’ils appelaient des lieux communs et tous les sujets étaient bons : le pâté chinois, l’accent français, le baseball, les pompiers, etc.
Serge Bouchard est un drôle de pistolet qui a beaucoup d’humour. Et à mon avis, un être d’une grande sagesse. Je lui laisse la parole :
« L’individu moderne est un être replié sur lui-même. Cependant, il ne s’agit pas là de la position du penseur. Non, voilà plutôt la position de l’ego qui s’ausculte et s’examine. Sa conscience de lui-même ne lui donne aucun répit. Dès lors, il développe les mauvais tics de l’inquiétude, il s’enferme et se referme, il baisse les armes et les yeux, il sait mille choses à propos de lui mais il ne comprend rien. Pour lui, tout s’explique mais rien ne fait sens. »
Serge Bouchard, L'homme descend de l'ourse, Boréal, p 77
17 décembre 2009
La rose et la résistance

Je mentionnais dans un autre texte (17 novembre 2009) mon admiration pour la série « Apocalypse, la 2e guerre mondiale. » Mon admiration pour sa valeur morale lorsqu’il est démontré avec tant de flagrance et de clarté que des conséquences désastreuses surviennent quasi obligatoirement quand des idéologies de pouvoir sont prônées par certains individus peu scrupuleux. Je mentionnais aussi le courage requis pour s’opposer et résister à de telles aberrations.
Nous ignorons sans doute beaucoup de la force d'attraction de la conformité et de l’imitation servile. D’autant plus lorsqu’il est question d’identité et d’appartenance à une nation ou un groupe. Ce n’est pas une mince tâche que de s’opposer à un rouleau compresseur. Et juger a posteriori d’une situation extrême en étant bien calé dans la ouate de conditions actuelles privilégiées m’apparaît douteux.
Ce problème m’accapare tout de même constamment. Comment vivre en accord avec son milieu (nation, groupuscule, famille, etc.) tout en ne reniant pas une individualité dont l’éthique est une valeur primordiale? Tout en ne renonçant pas aussi à se réaliser pleinement, de manière honnête, lucide et déterminée?
Il y a quelques semaines, au moment de fermer l’œil pour la nuit, une image m’est apparue sur l’écran intérieur : une rose blanche. L’apparition me laissa pantois. Elle dura plusieurs secondes puis s’effaça non sans s'imprégner profondément en moi.
Pourquoi cette image?
Je notai la date : le 18 novembre 2009, le lendemain de l’écriture de mon texte sur « l’Apocalypse… ».
Je laissai tout ça en suspend jusqu’à ce que je fasse une recherche internet il ya quelques jours. Je découvris que La Rose blanche est le nom d’un groupe de résistants allemands qui se forma en 1942 pour combattre le régime nazi du 3e Reich. Composés de cinq étudiants et d’un professeur, ils refusèrent le totalitarisme et rédigèrent principalement des tracts afin de convaincre les Allemands à s’ouvrir les yeux et à se révolter contre la dictature d’Hitler. En février 1943, ils sont dénoncés puis tués le jour même de leur procès sous motif de haute trahison, il va sans dire.
J’imagine le courage demandé pour exprimer leurs gestes. C’est ce courage que je louange. C’est ce courage que je transpose à la réalité de notre existence individuelle actuelle. J’y vois un art de stopper les courants aveugles d’expressions collectives, qu’ils surviennent à droite ou à gauche et qui ont la prétention de réguler le monde ou apporter ce paradis tant attendu ici-bas ou dans l’au-delà.
La « rose blanche » parle de ce courage de vivre dans un monde constamment en guerre contre ceux et celles déterminés à exprimer tout leur amour envers une vie qui les enchante.
14 décembre 2009
Voeux de pauvreté et de richesse
À la fin de ma vie, je veux mourir pauvre parce que j’aurai tout donné, et riche parce que j’aurai tout donné.
Ne rien voir...
Je suis d’avis que nous donnons vraiment du moment qu’autrui ne s’en aperçoit pas. Je constate par ailleurs que nous devenons un exemple seulement au moment où nous l’ignorons nous-mêmes totalement.
11 décembre 2009
"L'esprit du taï-chi"

Je vous recommande fortement le livre "L'esprit du taï-chi. (Sentir que les poissons sont contents) écrit par Lew Yung-Chien et publié aux éditions Le jour.
9 décembre 2009
L'art de récurer
Je disais un jour à une connaissance toute la difficulté d’écrire. Je parlais de cette angoisse de la page blanche, évidemment. Mais il y avait autre chose aussi. Je parlais de ce démon intérieur qui jouait du coude si je ne l’honorais pas en ignorant ses diktats.
Ma conscience est troublée par cette pulsion, tout me pousse à combler un vide, à matérialiser un océan d’inconnu en provenance de l’inconscient.
Il y a des tâches plus cool, plus faciles et moins dérangeantes. Je lui disais à cette connaissance: « Toutes les raisons sont bonnes pour ne pas écrire… et je les ai toutes essayées. »
J’écoutais à la télévision un écrivain s’exprimer sur cette souffrance. Il mentionnait que des fois « il préférait récurer le bol de toilette » plutôt que s’astreindre à la création.
Je n’en suis pas là, heureusement. Mais comment ne pas le comprendre. Des profondeurs de l’être surgissent des surprises qui troublent et font peur. Des évidences qu’on ne peut plus ignorer. C’est ce qui se passe lorsqu’il y a arrêt, silence, solitude. Pour l’écrivain, c’est indispensable. Il doit s’y soumettre, constamment.
Par la même occasion, je me dis qu’on retrouve sans doute là une raison à toute cette agitation autour de soi. On cherche l’euphorie,
Tout est bon plutôt que de s’arrêter simplement et méditer un tant soit peu sur le but de notre existence.
"Presque rien"
4 décembre 2009
Grand canyon
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Ces jours-ci mes sourcils se soulèvent. Cette courte phrase étonne par sa sonorité et, parce qu’elle étonne, notre jugement demeure en suspend pour un temps. Nous sourcillons.
En d’autres occasions, il m’arrive de froncer les sourcils. L’incompréhension et le déplaisir teintés de jugements apparaissent sans se dissimuler et font planer un soupçon d’impatience et de colère.
Les rides qui parcourent mon front sont le fait d’un étonnement continu qui s’est frayé un chemin au-dessus des sourcils pour se libérer ensuite de son énergie dans des canaux d’écoulement.
Je soulève les sourcils de plus en plus régulièrement. Je me surprends de mon étonnement, me décoiffe et m’estomaque moi-même et suspecte dorénavant une incompréhension définitive de la chose humaine, de son comportement.
J’aime croire que je porte une sorte de regard anthropologique sur mon entourage. Je veux comprendre et saisir à fond ses mots, expressions, ses silences, ses sautes d'humeur et ses pulsions. Je désire le voir en action. Et quoi de mieux pour le saisir que d’être en interaction avec lui. D’humain à humain.
Sauf que depuis quelques années mes occasions d’interactions ont diminué de beaucoup. Je me suis retiré dans mes appartements pour étudier, lire, contempler et écrire. Je suis dans une constante recherche de sens, de compréhensions, de vérités. Ce faisant, je pense que cette solitude désirée et nécessaire a fini par exacerber ma sensibilité au point qu’à chaque fois où je mets le nez dehors, un rien me touche et me brûle. Comme une impression de retour en enfance et de voir le monde pour la première fois avec son lot de tendre naïveté.
Voilà le paradoxe. Je fais tout pour me mettre dans un état de compréhension en me vidant des jugements et a priori, et le résultat de cette disposition n’en demeure pas moins une incompréhension de plus en plus prononcée.
Et je sourcille davantage.
J’ai un grand canyon d’étonnements creusé sur le front.
3 décembre 2009
"Un livre seul est dangereux..."
Silence, on tourne !
Le silence agit comme une couche de moelleux entre les éclairs stridents et lumineux de l'inconscient et le monde si fragile de la conscience humaine.