Les oiseaux s’envolent mais leurs chants et cris restent. Ils restent dans notre mémoire et se substituent aux musiques insipides qui ponctuent trop souvent nos ondes. Prenez par exemple cet elfe des forêts, la grive solitaire. Son chant éthéré et inimitable se déroule en un chapelet de notes qui ferait fondre même le plus insensible des êtres. La musique de l’oiseau l’emporte toujours, sans équivoque…
N’importe quel ornithologue vous le dira aussi, même un amateur, l’éclair lumineux qui se fraie un chemin à travers les branches des arbres jusqu’à nos pupilles met en branle un chatoiement de teintes qui n’a de cesse d’égayer notre regard attentif. L’orangé, l’indigo, l’écarlate viennent alors déposer cette touche délicate et subtile sur le grand tableau de verdure qui nous entoure.
Des chants uniques, une palette de couleurs bigarrées ou encore cette difficulté de les approcher sans les faire fuir font des oiseaux un bien précieux à respecter en les côtoyant.
Et il y a aussi leurs noms…
Qui a donné leurs noms aux oiseaux? Les dieux? Une assemblée de poètes inspirés?
J’ouvre mon Peterson au hasard et ce que je lis me renverse. Je ne peux m’empêcher de penser que les noms d’oiseaux sont un long poème d’amour adressé à l’artiste qui les a créés.
Les noms d’oiseaux forment un air joyeux qui se répercute jusqu’aux confins de notre conscience. Ils nous instruisent d’une beauté qui se niche jusque dans nos rêves.
Une fois, à la campagne, je marchais en compagnie de mes enfants et, à la vue d’un oiseau élégant perché sur une clôture, je leur dis que c’est un Tyran tritri. Dans leurs yeux et leurs bouches apparut aussitôt un « quoi? » Un nom de même, ça ne s’achète pas! Habitués à mes histoires, ils ne m’ont pas cru. J’ai insisté : un « Tyran tritri »!
Il y en a beaucoup d’autres du même acabit. Je pense aux Jaseur des cèdres, Pluvier kildir, Moqueur polyglotte, Bruant des neiges et autres Goglu, Fou de Bassan, Martinet ramoneur. En voulez-vous encore? Roitelet à couronne rubis, Tangara écarlate, Chevalier branlequeue, Carouge à épaulettes.
Mon préféré, c’est l’Engoulevent! Il est dommage qu’au crépuscule nous ne puissions plus entendre les exclamations électriques répétitives de cet oiseau qui sillonne le ciel en quête de nourriture. Il semble disparu de nos villes, « celui qui engouffre le vent »…
En latin, leurs noms scientifiques me laissent de marbre. « Dendroica fusca » n’a aucune saveur à mes yeux… Par contre, lorsque je lis Paruline à gorge orangée je fonds littéralement (la voir m’a déjà jeté par terre). Il en va de même pour Hirondelle bicolore. Cet oiseau fou réjouissait mes printemps d’enfant lorsqu’il glougloussait en s’installant dans ces petits condos en bois qui lui étaient réservés. Un autre grand disparu.
On ne se rabaisse jamais à observer les oiseaux et à décliner leurs noms. Une promesse les accompagne : nous transporter outre frontière pour y voler ensemble!
Signé : « Le Traquet motteux ».
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