26 août 2011

Histoire de pêche


Cette histoire s’est déroulée il y a un certain temps, je n’avais que vingt-et-un ans à l’époque. Elle est vraie bien qu’invraisemblable. Comme toutes les histoires de pêche.

Nous avions roulé près de trois heures jusqu’à notre camp de pêche, un endroit perdu dans une nature plus que sauvage. C’était bien ainsi. Mais, en compensation pour ce mal donné, nous n’espérions rien de moins qu’une pêche miraculeuse. L’optimisme était de mise. Après deux jours à pêcher, il fallut tout de même se rendre à l’évidence : ça ne mordait pas. Quelques petites truites ici et là garnissaient nos fonds de panier de bien piètre manière.

Il nous restait peu de temps pour sauver l’honneur. Au dernier jour, un peu las après le dîner, je m’étends sur ma couchette afin d’oublier la pêche et ses frustrations. Je rêvasse. Une idée me vient alors, un peu folle. Elle me dit de faire l’oiseau et de survoler notre lac à l’affut du moindre indice pouvant nous conduire dans une zone poissonneuse. Pourquoi pas. Point de départ : le petit quai.

Je vois d’abord l’étendue d’eau, une image de plus en plus précise se dessine. Je bondis ensuite et m’élève dans les airs. J’essaie de ne pas décrocher, de rester attentif, de croire à l’impossible… J’avance à une bonne hauteur en furetant à droite et à gauche jusqu’au moment où une image nette m’apparaît. J’aperçois quelques épinettes efflanquées penchées à 45 degrés au-dessus de l’eau en bordure du lac. Cette scène me fait littéralement bondir hors du lit. Je prends mon gréement puis détale en chaloupe après avoir dit à ma conjointe que je croyais avoir trouvé le bon « spot » de pêche. En fait, pour dire vrai, j’en avais la quasi-certitude.

Je rame plusieurs minutes. Je rame et scrute le rivage. Alors, je distingue les épinettes prètes à plonger dans l’eau, l’exacte image entraperçue quelques minutes plus tôt. Suis euphorique. J’approche la chaloupe lentement, tous mes sens en état d’alerte. Je vois maintenant des centaines de bulles qui explosent à la surface de l’eau. Est-ce un banc de poissons tendant leurs bouches à la recherche d’insectes? Je m’arrête à quelques mètres, descends l’ancre et installe ma ligne. Le tour est joué! Je gesticule dans ma chaloupe en faisant signe aux autres pêcheurs de s’approcher pour profiter de la manne. En une heure à peine nous avons sorti plus de truites que les autres jours réunis.

Difficile à croire? Pour sûr. Pêche miraculeuse? Absolument pas.

Nous sommes tous munis d’un même attirail à pêche hors du commun. Et ce n’est pas la volonté ni la raison. Nous appelons cela le rêve, l’imagination. Quand vient le moment de plonger dans les lacs, les rivières et les vastes océans du réel, nous ne pouvons trouver mieux.

L’imagination est liée au sentiment d’agir, puis de rapporter ce qui est utile pour notre survie et celle des autres.


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